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L’attitude de la Chine face au droit de la mer

Citer cet article (ISO-690) :
Justine COLLIGNON
Anissa AROUN
Mila ISSOLAH
,  
2025
,  
L’attitude de la Chine face au droit de la mer
,  
CEDIRE.

Une puissance maritime instrumentalisant les normes internationales

Introduction

En février 2025, l’arrestation de ressortissants chinois aux Philippines pour espionnage militaire près des îles Spratleys a ravivé les tensions en mer de Chine méridionale, mettant pleinement en exergue les ambitions géopolitiques et maritimes de Pékin. Pour autant, ces affrontements ne sont pas étrangers à la zone — la Chine ayant, depuis des décennies maintenant, adopté une posture particulière au regard des règles juridiques –  et notamment du droit international de la mer –  la régissant.  

Adoptée en 1982 à Montego Bay, la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer (CNUDM) définit les règles encadrant l’utilisation des espaces maritimes. Chaque État côtier peut revendiquer une mer territoriale jusqu'à 12 milles marins, où il exerce une souveraineté totale, ainsi qu’une zone économique exclusive (ZEE) de 200 milles marins, lui conférant des droits exclusifs sur l’exploitation des ressources naturelles1. Au-delà, le plateau continental peut s’étendre jusqu’à 350 milles sous certaines conditions, tandis que la haute mer demeure un espace international régi par le principe de liberté de navigation2.

Dans certaines régions stratégiques, l’application des règles internationales en matière de délimitation maritime suscite de nombreuses tensions, notamment en mer de Chine méridionale. Cette zone clé sur le plan économique et géopolitique, est marquée par des revendications territoriales multiples sur des îles et récifs, qui offrent un accès crucial aux ressources maritimes et aux routes commerciales. La Chine, qui cherche à affirmer son influence régionale, s’appuie sur une lecture contestée du droit international de la mer pour justifier ses prétentions. Mais ses ambitions dépassent largement le cadre juridique, elles sont nourries par des considérations géopolitiques complexes, où se mêlent des préoccupations sécuritaires – comme la protection des voies maritimes et l’accès aux ressources naturelles – et des intérêts économiques, notamment liés aux zones de pêche et aux hydrocarbures.

Ces tensions se cristallisent autour de la fameuse « ligne des neuf traits », une délimitation revendiquée par Pékin sur la base de justifications historiques, rejetée en 2016 par la Cour permanente d’arbitrage. Cette décision a encore renforcé les désaccords autour de l’application de la CNUDM dans la région, alimentant un climat de rivalités persistantes.

Dès lors, il convient d’analyser les manières par lesquelles se manifeste l’attitude chinoise vis-à-vis du droit international de la mer.

Afin de mieux comprendre l’attitude de la Chine vis à vis du droit de la mer, il est important d’analyser son rapport de puissance à la mer, qui joue un rôle central dans son appréhension du droit international (I) ainsi que d’examiner comment elle cherche à s’affranchir du système des normes internationales en adoptant une adhésion sélective de la CNUDM (II). Enfin, il sera question d’apprécier les conséquences de cette attitude au regard du droit international de la mer (III).

I. L’émergence de la Chine en tant que puissance maritime

L’ascension de la Chine en tant que puissance maritime est un processus complexe qui a évolué à travers l’histoire. Forte de sa position géographique stratégique, de son développement économique et de ses capacités militaires croissantes, la Chine a progressivement mis en place une politique maritime active visant à sécuriser ses routes commerciales, à exploiter les ressources maritimes et à étendre son influence sur les océans afin d’affirmer ses intérêts.

L’évolution de la puissance maritime chinoise

La République populaire de Chine peut aujourd’hui être qualifiée de puissance maritime. Selon Richard Harding, la puissance maritime ne se limite pas à la force navale. Elle est à comprendre comme la combinaison de « marines de guerre, d’une population maritime, de la société et du gouvernement, d’autres moyens (tels que la puissance continentale et des opérations conjointes), de la technologie, de la géographie maritime, des ressources budgétaires et de l’économie maritime »3. Mais alors que la Chine possède aujourd’hui ces éléments et continue d’approfondir leur développement, cela n’a pas toujours été le cas. Sa puissance navale a connu des périodes d’essor et de déclin, influencées par des dynamiques internes au pays et par des rapports de force internationaux.

Historiquement, la Chine a amorcé son développement maritime sous les dynasties impériales, se dotant d’une flotte marchande et militaire avancée et lançant des expéditions ambitieuses. Elle possédait à l’époque la plus grande flotte du monde. Cependant, au XVème siècle, un changement d’orientation stratégique s’opère : les enjeux maritimes passent au second plan. Son retrait maritime fait partie d'un contexte géopolitique complexe, dans lequel la Chine cherche avant tout à préserver sa stabilité interne, tout en faisant face à l'ascension des puissances maritimes européennes. Ce paradoxe – renoncer à une politique maritime ambitieuse alors qu’elle dominait les mers – reflète une vision impériale privilégiant la sécurité intérieure. La priorité est donnée aux défis terrestres, représentés notamment par la menace mongole. Dans cette logique, la Chine renonce progressivement à sa puissance maritime et met un terme aux grandes expéditions perçues comme inutiles. Elle juge avec méfiance le contact avec les étrangers. Par ailleurs, le Grand Canal constitue une alternative privilégiée pour le commerce intérieur qui réduit la nécessité du transport maritime. Comme l’écrit Hugues Eudeline, « la Chine se suffit alors à elle-même » pendant à peu près cinq siècles4.

Néanmoins, ce choix géopolitique ne put durer au contact des puissances maritimes européennes. Aux XIXème et XXème siècles, l’expansion commerciale des Occidentaux atteint la Chine et impacte négativement sa puissance et son économie. Elle entre dans ce qu’elle appelle le « siècle d’humiliation » qui s’étend de la Première Guerre de l’Opium à l’établissement de la République populaire de Chine (1840-1949). Durant ce siècle, la Chine se retrouve isolée et vulnérable en raison de troubles internes, d’invasions étrangères et de traités inégaux. Cette période, perçue comme humiliante, a façonné l’identité nationale chinoise et sa culture stratégique, et continue encore aujourd’hui de modeler sa politique extérieure. Par la suite, en 1949, la Chine cherche à se moderniser et s’engage dans une série de réformes économiques, sociales et politiques ambitieuses. Pour relancer la croissance économique, le gouvernement chinois choisit en 1978 d’abandonner la gestion de type soviétique en engageant des réformes progressives inspirées de l’économie de marché et en ouvrant le pays au commerce et aux investissements occidentaux5. C’est dans ces circonstances que la Chine se réouvre à la mer et développe une géopolitique axée sur le développement maritime. Elle décide d’exploiter les atouts stratégiques offerts par sa position avantageuse sur l’océan et adopte une approche duale (civile et militaire) dans tous les domaines maritimes.

La priorisation du domaine maritime par la Chine s’explique par plusieurs raisons. Ce choix tient tout d’abord à la richesse inhérente des océans et à leur importance économique. Les besoins alimentaires de la population chinoise sont immenses et la pêche permet en partie d’y répondre. Sa sécurité alimentaire est en effet assurée par l’exploitation halieutique et représente 5 à 8% des prises mondiales, alimentant 300 millions de personnes en Asie du Sud-Est. Aussi, l’exploitation minière et de gisements sous-marins d’hydrocarbures génèrent d’importants gains économiques et constitue une réponse à ses besoins industriels. Enfin, son essor commercial fulgurant a rendu impossible la dissimulation de ses ambitions, l’amenant à se doter d’une marine de guerre capable de protéger ses intérêts et ses ressortissants à travers le monde6.

L’affirmation de sa puissance maritime au XXIème siècle et la protection de ses « droits et intérêts maritimes »

Depuis la fin du siècle d’humiliation, l’implication de la Chine dans le domaine maritime n’a cessé de croître. En 2005, elle a opté pour une stratégie d’expansion maritime qui continue de se développer de nos jours, mobilisant d'importants moyens militaires, commerciaux, scientifiques et portuaires pour s'imposer comme une puissance maritime de premier plan. En novembre 2012, le président Hu Jintao déclare lors du 18ème Congrès du Parti communiste chinois que le nouvel objectif de la Chine est de devenir une haiyang qiangguo, qui signifie une « grande puissance maritime »7. L’actuel président Xi Jinping a réaffirmé et approfondi cette volonté en mobilisant l’État afin de mettre en place des « contre-mesures actives » pour protéger les « droits et intérêts maritimes » du pays, sur lesquels la puissance maritime chinoise repose. Selon I.B. Kardon, ces droits et intérêts maritimes constituent le point de convergence des éléments juridiques, politiques, stratégiques et économiques des ambitions maritimes chinoises. Ils ne sont jamais définis explicitement et correspondent à un vaste ensemble d’objectifs et d’activités qui guide sa vision du droit de la mer8. Cette utilisation vague permet à la Chine de les ajuster en fonction des circonstances politiques et de revendiquer des droits qui ne lui sont parfois pas reconnus par le droit international.

Bien qu’il n’y ait pas de définition précise, certaines caractéristiques de ces droits et intérêts maritimes ont été identifiées9. Tout d’abord, pour la Chine, ils sont légitimes. Cela explique pourquoi elle demande aux autres États de reconnaître ses revendications et actions en mer, fondées sur ce qu'elle considère comme leur validité juridique, historique et géographique. Deuxièmement, ils sont menacés par des sources internes et externes. Concernant les menaces extérieures, il est estimé que les activités d’autres Etats dans les zones côtières, du fait d’une longue période de passivité et de retenue, ont conduit à l’érosion de ces droits et intérêts. Sur le plan interne, ils sont menacés par un appareil bureaucratique et administratif maritime inefficace. Troisièmement, ils ont un caractère exclusif, ce qui signifie que les autres Etats ne peuvent pas les posséder. Enfin, ils se développent et sont amenés à évoluer en fonction des capacités maritimes de la Chine et du régime juridique maritime international. Dans la législation et la réglementation chinoises, les références aux droits sur des « espaces maritimes sous juridiction chinoise » font généralement référence à des zones maritimes spécifiques mais aussi à des espaces non définis.

Une politique maritime chinoise ambitieuse à la conquête des mers

Son ambition de dominer les mers se traduit par une politique maritime active dans tous les domaines maritimes. Tout d’abord, la Chine investit massivement dans sa marine et dans ses capacités navales, ce qui renforce sa présence dans les zones maritimes contestées, notamment en mer de Chine méridionale, mais aussi au-delà, dans l'océan Indien et l’Atlantique. D’après Hugues Eudeline, depuis 2014, sa flotte de guerre poursuit un développement qui la place au « deuxième rang mondial en termes de tonnage, derrière celle des États-Unis et devant celle de la Russie ». Il explique que pour atteindre les objectifs fixés par l’amiral chinois Liu Huaqing - considéré comme le « père de la marine chinoise moderne » et à l’origine du concept de « stratégie navale de défense au large » en 1986 - la Chine doit assurer le contrôle de la zone maritime située à l’intérieur de la première chaîne d’îles longeant ses côtes, développer une capacité de dissuasion sous-marine crédible reposant sur une maîtrise avancée des opérations sous-marines, et se donner les moyens d’intervenir en permanence et à l’échelle mondiale d’ici 205010. Néanmoins, malgré les évolutions récentes, la marine chinoise n’a pas fini sa montée en puissance. Elle doit encore combler certains écarts technologiques par rapport aux marines occidentales, notamment en matière d’expérience opérationnelle ou encore de projection de puissance sur de longues distances11 [11].

Cette marine, encore en pleine expansion, a également pour mission de protéger les routes commerciales de la Chine. Elle accompagne notamment le développement du projet des Nouvelles Routes de la Soie (l’Initiative de la ceinture et de la route de la soie), ayant pour objectif d’intensifier les échanges de la Chine avec les grands pôles économiques d’Asie, d’Europe et d’Afrique. En matière de projets d’infrastructures maritimes, la Chine mène la stratégie dite du « collier de perles ». Elle désigne l’idée de créer une série de bases navales, de ports et d’infrastructures le long de la route maritime reliant la Chine à l’océan Indien et au Moyen-Orient. Ces points stratégiques, souvent situés dans des pays partenaires, permettent à la Chine de sécuriser ses routes commerciales et d’accroître sa présence militaire dans la région12 [12]. Ces projets renforcent son influence sur les routes maritimes stratégiques, en ayant recours au droit de la mer qui est un outil clé pour sécuriser ces routes. Leur statut dépend des accords conclus avec les Etats partenaires. Certains États, notamment les États-Unis et l’Inde, dénoncent une stratégie d’entrave indirecte à la liberté de navigation par la Chine, qui pourrait chercher à contrôler les points de passage stratégiques13. Cette stratégie aide également à garantir ses approvisionnements en énergie. Cela s’inscrit dans le cadre du « dilemme de Malacca » qui désigne la dépendance de la Chine à la route maritime du détroit de Malacca pour ses importations de pétrole et ses échanges commerciaux. Si cette voie venait à être bloquée, la Chine risquerait de se retrouver coupée de ressources cruciales, ce qui représenterait une menace pour sa sécurité énergétique et son économie14. De plus, le projet des Nouvelles Routes de la Soie a été étendu en 2017 avec l’intégration de la Route de la Soie Polaire, qui représente un grand potentiel d'extraction de ressources et de transport maritime dans la région arctique15.

Enfin, cette dépendance aux importations énergétiques pousse la Chine à sécuriser ses propres approvisionnements en énergie et à renforcer son contrôle sur les ressources maritimes environnantes. Sous la présidence de Xi Jinping, l’intérêt de la Chine pour l'exploration et l'exploitation des ressources minérales en haute mer s’est intensifié. La Chine a investi dans la recherche, et depuis 1990, l'Association chinoise pour la recherche des ressources minérales océaniques (COMRA) est un acteur majeur du secteur. Elle est également un membre très actif de l'Autorité Internationale des Fonds Marins (AIFM), qui est l’organe onusien chargé de réglementer l’exploitation des fonds marins au-delà des juridictions nationales. L’AIFM délivre des contrats d’exploitation et encadre l’exploitation minière en haute mer. La Chine est le premier bénéficiaire des licences d’exploration minière en eaux profondes, avec plusieurs sites dans le Pacifique et la zone Clarion-Clipperton et elle est bien positionnée pour obtenir des contrats d’exploitation futurs16. Ce leadership est renforcé par son rôle diplomatique et économique croissant dans la région, et facilité par l’absence des Etats-Unis qui, n’étant pas partie à la Convention sur le droit de la mer, ne participent pas aux négociations internationales sur le sujet17.

Le souvenir du siècle d’humiliation a été marqué par l’ingérence des puissances étrangères mais aussi par la perception d’un droit international imposé par des logiques hégémoniques. Cela a conduit la Chine à considérer ses espaces maritimes comme une question domestique : Pékin les voit comme le prolongement naturel de son territoire, ce qui influence directement sa manière d’interpréter et d’appliquer le droit de la mer18.

II. L’adhésion sélective de la Chine au droit international de la mer

La stratégie de puissance adoptée par la Chine dans cette région présente un paradoxe ; elle vise à se doter d'une force maritime de premier plan tout en remettant en cause les principes fondamentaux du droit de la mer, notamment la liberté de navigation, qui a pourtant favorisé son essor économique19. Cette attitude provocatrice et les interventions de la Chine en mer de Chine méridionale s’inscrit dans « une stratégie qui tente de s’affranchir du système des normes internationales reconnues »20, témoignant ainsi de l’affirmation croissante de ses ambitions. En effet, ce rejet partiel du système international s'inscrit dans une logique géopolitique plus large ; il répond à la volonté de Pékin de protéger ses ressources maritimes, de sécuriser des routes commerciales stratégiques et d'affirmer son influence sur des zones maritimes cruciales.

Une interprétation extensive des droits souverains

La Chine, bien que signataire de la CNUDM, remet en cause la délimitation de son espace maritime. Depuis 1947, elle revendique la « ligne des neuf traits » – également appelée « langue de buffle » –, qui englobe 80 % de la mer de Chine méridionale et empiète largement sur les zones économiques exclusives des États voisins (Philippines, Vietnam, Malaisie, Indonésie, Brunei, Taïwan). Sans qu’aucune distinction ne soit faite par la Chine entre espaces sous souveraineté (eaux intérieures, mer territoriale) et espaces sous juridiction (zone contiguë, ZEE, plateau continental).

Concernant les espaces sous souveraineté, un État y exerce un contrôle total, comme s’il s’agissait de son territoire terrestre. L’État y applique pleinement ses lois, contrôle la navigation et exploite librement les ressources, des espaces qui peuvent être considérés comme une extension du territoire national. Quant aux zones maritimes de juridiction, l’État y possède des droits spécifiques sans exercer une souveraineté complète. S’agissant des ZEE par exemple, un État côtier y détient des droits souverains pour explorer et exploiter les ressources naturelles (pêche, hydrocarbures)21, mais la navigation et d'autres activités maritimes restent libres22.

Ainsi, la Chine maintient le flou quant aux droits qu’elle revendique sur la mer méridionale, selon elle, se sont des « eaux chinoises historiques », des « zones de souveraineté incontestable » ou encore des « zones de pêche chinoises traditionnelles »23. Elle s’appuie sur une supposée antériorité historique de sa présence dans la région, se fondant notamment sur des cartes des années 1930 utilisées à l’époque pour contrer l’influence des puissances occidentales24 mais qui ne repose sur aucun fondement juridique international.

En revendiquant une souveraineté sur des zones qui ne sont censées relever que de sa juridiction (comme les ZEE), la Chine empiète sur les droits des autres États à la liberté de navigation, à la pêche ou à l’exploitation des ressources, en contradiction avec le principe de partage des espaces maritimes. Une confusion qui sert de prétexte à un contrôle accru de la Chine qui impose sa vision du droit de la mer, justifiant ainsi les interventions de la marine chinoise dans des zones disputées.

Pékin adopte une interprétation extensive du droit maritime en modifiant la définition des lignes de base droites, ce qui étend ses eaux territoriales bien au-delà des 12 milles marins fixés par la Convention25. Elle conteste également le droit de passage inoffensif des navires militaires étrangers et impose une notification préalable pour toute activité militaire dans sa ZEE26, des exigences considérées comme excessives au regard du droit international, symbolisant une fois de plus, une extension de ses prétentions territoriales.

En août 2013, la Chine a accentué ses revendications en publiant une nouvelle carte intégrant une « ligne à dix traits » autour de la mer de Chine méridionale, ravivant les tensions avec les États riverains27. Ces évolutions témoignent d’une stratégie visant à redéfinir l’ordre juridique maritime selon ses propres intérêts, au détriment du cadre normatif établi par la CNUDM.

La construction des îles artificielles comme détournement du droit international

La Chine adapte ses revendications en mer de Chine méridionale depuis la Seconde Guerre mondiale, en publiant de nouvelles cartes et en ajustant sa stratégie face aux normes du droit international. Avec la Convention de Genève sur la Haute mer de 1958, elle reconnaît le principe selon lequel la souveraineté maritime découle du contrôle territorial, mais cherche à contourner les règles des ZEE de par sa « grande muraille de sable » en occupant, parfois par la force, des îlots inhabités, reconnus désormais comme des entités administratives à part entière28. Pékin impose progressivement une stratégie dite du « fait accompli » en occupant îlots et atolls pour ensuite en revendiquer les ZEE qui s’y attachent29.

Néanmoins, selon l’article 121 de la CNUDM, « Les rochers qui ne se prêtent pas à l’habitation humaine ou à une vie économique propre n’ont pas de zone économique exclusive ni de plateau continental ». Ainsi, seules les îles capables de supporter une habitation humaine ou une vie économique autonome peuvent générer une ZEE. La Chine contourne cette exigence en prenant possession et en construisant des îles artificielles de types îlots et récifs. Pourtant, selon l’article 58 de la CNUDM « les îles artificielles, installations et ouvrages n’ont pas le statut d’îles. Ils n’ont pas de mer territoriale qui leur soit propre et leur présence n’a pas d’incidence sur la délimitation de la mer territoriale, de la zone économique exclusive ou du plateau continental ». Ainsi, ces îles artificielles et installations maritimes ne bénéficient pas des droits maritimes associés aux îles naturelles, notamment les ZEE qui s’y attachent. De ce fait, le tribunal permanent d’arbitrage a jugé, en 2016, qu’au moins une partie des îlots de la mer du Sud (les Spratleys) sont des rochers au sens de la CNUDM, ce qui signifie qu’ils relèvent d’une catégorie d’îles inaptes à générer de tels droits30.

Par la suite, la Chine a progressivement abandonné la référence aux îles prises individuellement et à la ligne des neuf tirets au profit d’un discours sur la base de quatre archipels. L’intérêt est d’écarter la décision du tribunal de 2016, qui interdisait le droit de générer une ZEE aux îlots de Spratleys. Désormais la RPC procède à une requalification en archipels pouvant selon elle produire des espaces maritimes conformes au droit de la mer31.

Or, selon l’article 46 de la CNUDM, un archipel est “un ensemble d’îles”. Mais une ZEE ne peut être générée que par des îles répondant aux critères de la CNUDM, et non par un regroupement d’îlots. La Chine cherche à relier des îles et des récifs éloignés en traçant des lignes de base droites, comme elle l’a fait en 1996 autour des îles Paracels. Cependant, selon l’article 7 de la CNUDM, ces lignes ne sont autorisées que dans des cas spécifiques (côtes très échancrées et découpées ou chapelet d’îles côtières proches du continent). Or, les Paracels et Spratleys sont des groupes d’îles dispersées, non reliées à la côte chinoise, ce qui invalide cette méthode. Une méthode qui illustre à nouveau la tentative de la Chine d’instrumentaliser le droit afin de justifier ses revendications maritimes.

La défiance de la Chine vis à vis des mécanismes internationaux

Pékin cherche à imposer sa propre vision du droit, qu’elle oppose aux normes « occidentales »32. En refusant de reconnaître le jugement du Tribunal permanent d’arbitrage, la Chine se place en marge du consensus international. Bien que la RPC ait signé la CNUDM elle a émis des réserves sur certaines dispositions, notamment celles relatives au règlement des différends. En 2006, elle a explicitement exclu, en vertu de l’article 298 de la Convention, plusieurs types de litiges des procédures d’arbitrage obligatoire, notamment ceux portant sur la délimitation des zones maritimes et les activités militaires33. En évitant les juridictions internationales, la Chine limite l’influence d’acteurs extérieurs sur les litiges maritimes et maintient une interprétation du droit qui lui est favorable. Cela lui permet d’appliquer sa vision extensive de la souveraineté maritime. De plus, la négociation bilatérale lui permettrait d’exercer une pression diplomatique et économique sur des États moins puissants (Philippines, Vietnam, Malaisie) en exploitant les inégalités de pouvoir. Une volonté qui reflète le désir de Pékin de contrôler l’interprétation du droit maritime sans ingérence extérieure, tout en évitant de reconnaître la légitimité d’instances jugées influencées par l’Occident. Une méthode qui s’est avérée concluante lors de l’accord sino-vietnamien concernant le golfe de Tonkin en 2000.

Néanmoins, dans son différend avec les Philippines, Pékin a refusé de participer à la procédure d’arbitrage initiée en 2013, contestant la compétence du tribunal. En juillet 2016, la décision arbitrale a invalidé la légitimité de la « ligne des neuf traits », concluant qu’elle n’avait aucun fondement juridique. La Chine a dès lors rejeté cette sentence, la déclarant « nulle et non avenue », réaffirmant ainsi sa position34. Une stratégie qui montre bien un refus d’une interprétation du droit maritime qui ne servirait pas ses intérêts.

Pour elle, le recours des Philippines et d’autres États au tribunal d’arbitrage s’inscrit dans une guerre hybride contre ses intérêts, perçue comme une « provocation sous couvert du droit »35. Ce rejet interroge la capacité de la Chine à respecter ses engagements internationaux, comme en témoigne son non-retrait du Banc de Scarborough, contrairement aux Philippines, malgré une médiation américaine.

Le refus chinois d’accepter des arbitrages internationaux ne repose pas uniquement sur une stratégie de puissance. Il s’ancre aussi dans une perception historique du droit international comme un instrument de domination occidentale, héritée de l’ère coloniale36. Cette méfiance est renforcée par la culture politique chinoise, qui privilégie les négociations bilatérales aux arbitrages tiers, perçus comme une menace aux relations de voisinage. La composition des tribunaux internationaux constitue également une source de réticence. La décision de 2016 a été rendue par une majorité de juges européens, ce qui alimente les suspicions chinoises d’un biais en faveur des puissances occidentales et la présence d’un président japonais au TIDM a également renforcé ces craintes37. Cette perception d’un droit international façonné par l’Occident contribue à justifier le rejet des décisions arbitrales par Pékin et alimente une remise en question plus large de l’impartialité des institutions juridiques internationales.

Ainsi, la position chinoise illustre un double enjeu : d’un côté, une stratégie de puissance visant à redéfinir les normes juridiques à son avantage ; de l’autre, une défiance historique envers un droit international perçu comme un prolongement des rapports de force hérités de la colonisation.

III. Les conséquences de l’attitude chinoise sur le droit de la mer

L’attitude particulière chinoise – de par ses revendications, la construction d’îles artificielles ou son interprétation extensive des droits souverains – a de nombreuses implications sur le droit international de la mer. Celui-ci se voit véritablement défié en ses principes fondamentaux-mêmes dans une opposition pleine d’effets sur l’ordre juridique international.

La remise en cause chinoise du droit international de la mer comme véritable outil neutre et impartial de gestion commune des eaux

L’attitude chinoise face au droit de la mer se doit d’être comprise au regard de la perception qu’a Pékin, assez largement, du droit international. Celle-ci ne se limite pas à une seule défiance envers le droit international, mais s’ancre également dans des considérations historiques et géopolitiques. En effet, le droit international, tel qu’analysé par la diplomatie chinoise, serait empreint de l’influence du colonialisme ayant teinté le XXème siècle : dès lors, moins qu’un droit des gens, il serait droit des puissants. Cette vision naît notamment au lendemain des guerres de l’opium, à la suite duquel se voient se créer entre la Chine, les puissances occidentales, et le Japon, des traités inégaux. Ceux-ci empiétaient largement sur la souveraineté du pays de multiples manières, passant notamment, pour ce qui nous concerne, par le biais de l’établissement de ports sur les côtés chinoises pour le seul bénéfice du commerce occidental38. Ainsi, les flottes étrangères avaient pleine capacité d’utilisation des eaux intérieures de Pékin à cet effet.

Par ailleurs, le droit international, tel qu’il s’est imposé à la communauté internationale postérieurement à l’établissement des Nations Unies, présente les “caractéristiques de la juridicité occidentale” d’influence notamment européenne39. Il n’est pas surprenant de voir être constaté cet héritage principalement occidental, qui trouve ses limites dans le cadre d’une société pluriculturelle et multilatérale. La Chine est ainsi loin d’être seule à le percevoir d’une telle manière. Elle est suivie, par exemple, par les Etats décolonisés d’Asie et d’Afrique, ainsi que par les pays de tradition islamique40.

Ainsi, certains chercheurs estiment qu’il existerait « des obstacles psychologiques » – pour la Chine, mais pas seulement – à l’usage de mécanismes juridiques internationaux41 : tant du fait de ce biais précité que du fait de l’inexpérience juridictionnelle chinoise conséquence de la culture asiatique de l’amiable.  

La Chine adopte conséquemment une position révisionniste à l’égard des traités internationaux42, et ce, alors même qu’elle était présente lors de la rédaction de ce qui est communément appelé la Constitution des mers – la CNUDM. Cette réflexion renvoie à la maxime chinoise « … above there are policies, but below, there are counter-policies »43 par laquelle il est établi que les décisions prises par les autorités chinoises (telle que la ratification des traités) peuvent être considérées invalides postérieurement, si celles-ci restreignent les intérêts géopolitiques et nationaux chinois. Il n’est dès lors que peu surprenant de voir qu’en 2019, les autorités chinoises avaient appelé à une réécriture de la Convention en l’alignant au droit chinois maritime.

Le droit de la mer : entre instrumentalisation et impuissance

Dès lors, bien que la Chine puisse considérer le droit international comme un instrument partial par nature, elle en fait néanmoins usage de manière opportuniste, l'adaptant à ses propres objectifs stratégiques. Ainsi, le droit de la mer devient un levier au service de l'expansion maritime chinoise, à travers des interprétations qui peuvent parfois s'éloigner des principes fondamentaux de la CNUDM.

Cette extensivité se voit être le fruit de conséquences significatives sur la stabilité régionale, notamment par une exacerbation des conflits entre Etats voisins. Les affrontements se multiplient d’année en année, et ont pu particulièrement avoir lieu entre pêcheurs vietnamiens et navires chinois près des îles Paracels, et similairement, entre bâteaux philippins et marine de la RPC aux alentours du récif de Scarborough44. Ces rapports complexes entre Pékin et ses alentours a mené à ce que soit conclu, entre ces puissances et les Etats-Unis, de nombreux accords juridiques internationaux. Washington se permet par conséquent d’établir des opérations de “liberté de navigation” (dites “FONOPs” [Freedom of Navigation Operations]), trouvant leur fondement dans la Convention de Montego-Bay. L’Etat se défend notamment en expliquant vouloir démontrer, en conformité avec le droit international, que “the United States will fly, sail, and operate wherever international law allows – regardless of the location of excessive maritime claims and regardless of current events”45... Si cette initiative est véhément contestée par la Chine, elle trouve soutien auprès de nombreuses puissances, notamment européennes, telle que la France.

De plus, cette approche flexible du droit international au profit de Pékin instaure un précédent préoccupant pour d’autres nations. En refusant l’arbitrage international, comme ce fut le cas en 2016, et en imposant une interprétation unilatérale du droit de la mer, la Chine contribue à fragiliser la force obligatoire du droit international. Ce faisant, elle incite d’autres États à suivre cette voie, mettant en péril la primauté du cadre juridique universel. Elle est déjà suivie, par exemple, par le Japon dans le cadre de son approche de l’île Okinotori-shima – présages, selon le chercheur Peter A. Dutton46, d’une « érosion juridique » du cadre international par le fait du comportement chinois. En réalité, ce comportement n’est pas nouveau et se voit de plus en plus à l’international. Ainsi, l’on peut citer la Russie, qui a pu refuser des procédures arbitrales relatives à la CNUDM dans le cadre de l’affaire Arctic Sunrise de 2013 ; mais aussi le Japon et la Corée du Sud, s’opposant dans le cadre de l’appréhension des rochers Liancourt (Dokdo/Takeshima). En effet, cette dernière préfère ne pas porter l’affaire devant la CIJ, malgré l’insistance japonaise.  

Généralisée, cette perception particulière du droit international de la mer endigue son efficacité même. Ce droit peine à s’imposer face aux récits nationalistes et aux intérêts diplomatiques et stratégiques s’érigeant en barrières. Dès lors, il risque d’être réduit à un simple instrument de négociation ou d’opposition diplomatique entre grandes puissances. Cette situation souligne la nécessité d’adapter et de renforcer le droit de la mer afin d’en garantir l’application effective à tous.

La mer de Chine méridionale, véritable théâtre de lawfare

Certains voient en cette utilisation du droit de la mer par la Chine un droit politisé – une « lawfare »47. Cette expression, manifestant la guerre par le droit, est notamment, mais non-exhaustivement, utilisée pour refléter l’utilisation stratégique du droit dans le cadre de revendications politiques et géopolitiques. Alors même que le droit international est marqué par son efficacité en demi-teinte en la matière, il est en effet également sur-utilisé par les puissances en présence dans le cadre des conflits impliquant la mer de Chine méridionale. L’utilisation d’une telle lawfare permet d’atteindre des objectifs sans passer par des moyens militaires – qui portent le risque inhérent de pouvoir teinter la réputation internationale du pays.

Les activités de Pékin elles-mêmes sont notamment mises en cause en tant que telles, en ce que l’Etat a pu s’appuyer sur des notions ambiguës, comme les « droits historiques », pour revendiquer ses possessions militaires nouvelles. Il a également pu être retrouvé, dans le cadre de dialogues institutionnels ou de recherches, de multiples références au droit pour contrer les arguments d’Etats voisins à la Chine dans le cadre de l’appréhension de la mer de Chine méridionale. C’est ainsi que, par exemple, « l’occupation des îles Ryuku par le Japon ne repose sur aucune base juridique, et par conséquent, est complètement illégale » selon Zhang Haipeng et Li Guoqiang, chercheurs de l’Académie chinoise des sciences sociales. Similairement, la Chine se sert aussi de la CNUDM pour défendre ses intérêts face à la présence militaire américaine en mer de Chine méridionale. Ainsi, elle a notamment pu invoquer l’article 58 de la Convention, relatif aux droits et obligations des Etats dans la ZEE d’un autre Etat, au sujet de zones qu’elle avait revendiqué et qui étaient parcourues par la Navy américaine dans le cadre de leurs FONOPs.

De plus, depuis 2003, la Chine semble avoir trouvé son propre concept, différent mais assimilable à la lawfare : la “falü zhan” (法律战). Comme la lawfare, cette expression est utilisée par le Parti pour désigner l’usage du droit pour faire la guerre, afin, selon la Commission militaire centrale, de “dissuader, attaquer, contre-attaquer, contraindre, sanctionner et se protéger, afin d'obtenir une « supériorité normative »  permettant d'assurer l'initiative politique et la victoire militaire.”48. La Chine se sert dès lors du droit non pas pour asseoir son plein-respect, mais dans le but d’obtenir une légitimité politique incontestable, conformément aux intérêts stratégiques étatiques. La falü zhan se différencie toutefois de la lawfare en ce qu’elle est une part de la doctrine officielle du Parti, pleine de sens au regard des dispositions internes à Pékin, et ne portant pas les mêmes connotations que le concept “lawfare” a, lui, à l’international, du fait du flou le caractérisant.

Dès lors, cette utilisation stratégique du droit par les autorités chinoises ne passe pas seulement par la seule utilisation des traités, mais aussi par le droit national chinois, qui trouve prééminence dans le cadre de l’ordre juridique Pékinois.

La portée limitée de l’attitude chinoise sur le droit de la mer

Voir le droit de la mer utilisé comme lawfare dénote nécessairement de sa certaine autorité, en ce que, pour être utilisé comme bouclier, ce droit doit nécessairement être vu comme ayant ce pouvoir. Par ailleurs, la lawfare ne saurait être dite comme spécifique à la Chine – et ainsi, de nombreuses pratiques légales, dans le sens du droit international de la mer, ont pu être mises en place face aux violations et méconnaissances du droit de Pékin.

La sino-lawfare elle-même se heurte à plusieurs limites. La vision alternative chinoise du droit de la mer ne trouve de résultats tangibles qu’en la pratique d’un fait accompli dangereux, menant à une militarisation constante de la région, qui va à l’encontre même de l’utilisation de la lawfare en lieu et place d’une warfare. Aucun consensus international ne soutient l’existence de « droits historiques » dans la zone contestée, et Pékin ne parvient pas à rassembler une coalition d’États partageant sa vision49. Par ailleurs, l’arbitrage de 2016 relatif à la mer de Chine méridionale, bien qu’il n’ait été accepté par la Chine elle-même, a rencontré un grand soutien dans la communauté internationale. Similairement, le glissement de notions de la “ligne des neufs traits” aux “quatre archipels” opéré par la République Populaire après son rejet de la solution arbitrale, même s’il ne permet pas le respect du droit international de la mer, amène à la nécessaire réflexion que la Chine tient tout de même compte des stratégies légalistes prises à son encontre. C’est ainsi que Xi Jinping énoncera, en 2022 : “We must use legal means to conduct international struggles.”

En réalité, en général, il est possible de constater que le droit de la mer n’est pas touché dans sa globalité, malgré la fragilité de ses principes face à la vision chinoise. C’est en ce sens que le chercheur I. B. Kardon50 argue que la Chine ne change pas tant les règles du droit international maritime qu’elle n’en réduit leur importance. En effet, c’est dans sa seule région que la Chine se permet d’exercer une telle influence sur le droit international des mers51.

A titre subsidiaire, il serait également faux de penser l’attitude chinoise comme seul frein à l’application effective au droit international. Ainsi, Pékin semble puiser son inspiration, à tous égards, de la vision américaine du droit de la mer. Washington n’aura en effet jamais ratifié la Convention de Montego Bay, vue comme un frein aux projections politiques états-uniennes. Par conséquent, les Etats-Unis ne peuvent être juridiquement inquiétés devant des tribunaux internationaux du fait des dispositions de cette Convention. Cette posture flexible, s’expliquant par la primauté donnée par les Etats-uniens à leurs intérêts stratégiques, menace l’universalité de cette Convention vue comme Constitution internationale des mers. Ce comportement est d’autant plus marqué qu’il s’accompagne d’une ingérence certaine dans la région de l’armée américaine de par ses opérations de libre-navigation, qui rencontrent une forte protestation chinoise, et exacerbe des rivalités déjà solidement ancrées.

Toutefois, malgré l’omniprésence pratique de cet État dans la région, l’absence légale de toute influence américaine dans le cadre juridique maritime international est d’une grande aide à la politique maritime internationale chinoise52. Ce n’est dès lors pas tant la seule attitude chinoise qui porte atteinte au droit de la mer que la résurgence globale des souverainetés étatiques face au droit qui marque notre siècle.

[1] Articles 55 à 75 CNUDM

[2] Articles 86 à 120 CNUDM

[3] Till, G. (2023). Seapower: A guide for the Twenty-First Century, Londres, Routledge

[4] Eudeline,H. (2024). Géopolitique de la Chine : une nouvelle thalassocratie. PUF Géopolitiques. 

[5] Ikram, A. (2025). The Century of Humiliation & Chinese Strategic Culture. Paradigm Shift

[6] Prazuck, C. (2021). Mer de Chine et droit de la mer : Le paradoxe chinois. Ifri.

[7] McDevitt, M. (2016). Becoming a Great “Maritime Power”: A Chinese Dream. CNA.

[8] Hayton, B. (2024). China’s Law of the Sea: The New Rules of Maritime Order: Isaac B. Kardon. Asian Affairs, 55(4), 738–740.

[9] Kardon, I.B. (2015). China’s Maritime Rights and Interests: Organizing to Become a Maritime Power. CNA.

[10] Eudeline. H. (2018). L’extraordinaire essor de la puissance navale chinoise. Revue Défense Nationale n°807. 

[11] McDevitt, M. (2016). Becoming a Great “Maritime Power”: A Chinese Dream. CNA.

[12] Amelot, L. (2010). La stratégie chinoise du « collier de perles ». Outre-Terre n°25-26(2). pp 187-189.

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[14] Amelot, L. (2010). Le dilemme de Malacca. Outre-Terre n°25-26(2). pp 249-271.

[15] Heggelund, G., Lamazhapov, E. et Stensdal, I. (2023). China’s Polar Silk Road: Long Game or Failed Strategy?. The Arctic Institute.

[16] Gueguen, N. et Pina, C. (2024). L’exploitation des ressources minières des grands fonds marins internationaux dans le Pacifique : le rêve de Nauru, de la Chine… et des Etats-Unis. IRSEM. Brève stratégique-72.

[17] Camacho, S. et Kardon, I.B. (2023). Why China, Not the United States, Is Making the Rules for Deep-Sea Mining. Carnegie Endowment for International Peace.

[18] Balsano, P. et Lasmoles, O. (2021). La Chine et le droit international de la mer : un dialogue impossible ?. The Conversation.

[19] Prazuck, C. (2021), Mer de Chine et droit de la mer : le paradoxe chinois, Ifri.

[20] Crouzatier, J. (2021), Appropriation de la mer en Asie du Sud-Est, Conseil québécois d’Études géopolitiques.

[21] Article 56 CNUDM 

[22] Le Shom (2023), Le Shom, expert des délimitations maritimes. 

[23] Prazuck, C. (2021), op. cit. 

[24] Chine : la mer, la puissance et le (non) droit - Le Dessous des cartes | ARTE

[25] Prazuck, C. (2021), op. cit. 

[26] Notification and statement of claim on west philippine sea, The Embassy of the Pepople’s Republic of China, 22 janvier 2013, Manille. 

[27] Alexeeva, O. et Lasserre, F. (2024), Carte à la une. En mer de Chine méridionale, le jeu politique de l’interprétation du droit de la mer, Géoconfluences. 

[28] Saint-Paul, P. (2015). Pékin construit une « grande muraille de sable » en Mer de Chine, Le Figaro.

[29] Boniface, P. (2024). Les conflits en mer de Chine | Expliquez-moi.

[30] Detry, C-E. (2021). Les positions chinoises en droit de la mer contestées lors d’un récent échange de notes verbales aux Nations Unies. FDBDA. 

[31] Alexeeva, O. et Lasserre, F. (2024), Interpréter le droit international, un outil d’influence politique en Mer de Chine du Sud ?, Diploweb.

[32] Hébrard, P. et Niquet, V. (2016), Procédure d’arbitrage et montée des tensions en mer de Chine : la nécessaire consolidation du système de normes internationales, Fondation pour la recherche stratégique.

[33] Notification and statement of claim on west philippine sea, The Embassy of the Pepople’s Republic of China, 22 janvier 2013, Manille. 

[34] ACERIS LAW LLC (2020). Arbitrage Relatif à la Mer de Chine Meridionale.

[35] Hébrard, P. et Niquet, V. (2016), op. cit. 

[36] Balsano, P. et Lasmoles, O. (2019), Éléments de compréhensions juridiques et géopolitiques en mers de Chine, Revue Défense Nationale, p.92 à 98.

[37] Ibid.

[38] Mengin F. Legs coloniaux et formation de l’Etat dans le monde chinois. 2005. ffhal-01065616f 

[39] Tourme-Jouannet, E. (2022). Le Droit international | Cairn.info. (3e éd.). Presses Universitaires de France.

[40] Sahovic M. Influence des États nouveaux sur la conception du Droit international. — Inventaire des positions et des problèmes. In: Annuaire français de droit international, volume 12, 1966. pp. 30-49. 

[41] Balsano, P. et Lasmoles, O. (2019). Éléments de compréhensions juridiques et géopolitiques en mers de Chine. Revue Défense Nationale, N° 823(8), 92-98. 

[42] Sachica, C. Lawfare: China’s new gambit for global power. (s. d.). Global Affairs And Strategic Studies. 

[43] Allayarov, S. International Law with Chinese Characteristics - The South China Sea Territorial Dispute | Institute of International Relations Prague - Expertise to impact. (s. d.). 

[44] White, E., & Hille, K. (2024, 2 octobre). Vietnamese fishermen injured in clash with Chinese vessels. Financial Times. 

[45] Gédéon, L. (2022). Les opérations FONOPS. Geopole

[46] Dutton, P. A. (2023, 23 juin). Is China Reshaping the Global Oceans Regime? Foreign Policy. 

[47] Schultheiss, C. (2022). La Chine et les limites conceptuelles et pratiques de la guerre juridique en mer de Chine méridionale. Revue Défense Nationale, N° 852(7), 31-37. 

[48] Monteiro Da Silva, C. (2022). Falü zhan : la « guerre du droit », une version chinoise du lawfare ? Raisons politiques, 85(1), 89-99. 

[49] Schultheiss, C. (2022), op cit.

[50] Kardon, I. B. (2023). China’s Law of the Sea. Yale University Press. Dans Google Books. 

[51] Dutton, P. A. (2023), op. cit.

[52] Ibid.

L’attitude de la Chine face au droit de la mer

La Chine, en tant que puissance maritime en expansion, vise à renforcer son contrôle sur des zones maritimes clés, notamment la mer de Chine méridionale et la mer de Chine orientale. L’arrestation de ressortissants chinois aux Philippines en février 2025 illustre l’intensification des tensions dans cette zone stratégique, où Pékin revendique des territoires maritimes sur la base de la « ligne des neuf traits », une prétention pourtant invalidée par la Cour permanente d’arbitrage en 2016. Loin de se conformer aux règles établies par la Convention des Nations Unies sur le droit de la mer, la Chine adopte une approche sélective, exploitant le droit à son avantage tout en contestant les décisions qui lui sont défavorables. La construction d’îles artificielles et la militarisation progressive de la région témoignent de cette stratégie. Cette attitude fragilise l’ordre juridique maritime et transforme la mer de Chine méridionale en un foyer de tensions où se croisent enjeux géopolitiques, économiques et sécuritaires.
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